Nous atterrissons à Cuba bien crevés, nous n’avons dormi que quelques heures avant de décoller de México, à papoter jusqu’au bout de la nuit avec nos amis Esteph et Nacho. À l’aéroport de La Havane, nous changeons quelques pesos mexicains qu’il nous reste pour des pesos convertibles (CUC), une des deux monnaies du pays. Le système paraît étrange à nos yeux. Les cubains sont payés en monnaie nationale, le peso cubain (CUP), mais les étrangers doivent payer tous les services touristiques (hôtels, restaurants, transports, souvenirs,…) en peso convertible qui vaut 25 fois plus que la monnaie nationale, cherchez l’erreur.
A Cuba, il y a le choix entre deux types de logement. L’hôtel, très coûteux et avec une qualité de service moindre, et la « casa particular », c’est-à-dire chez l’habitant. Ce sont des familles qui ouvrent leur maison aux touristes, tout en payant un impôt au gouvernement, et qui proposent généralement les repas. Il y a aussi des maisons illégales qui ne rendent pas de compte au gouvernement, mais selon le guide que nous avons, il faut les éviter car si elles se font choper, l’amende est bien salée. Bref, nous dégotons une casa particular en plein cœur du vieux quartier de la Havane, chez un dénommé Luis dont l’adresse nous a été recommandée par une amie du Mexique qui a voyagé dans ce pays il y a quelques semaines. Nous négocions un prix défiant toute concurrence avec petit-déjeuner et souper inclus, l’appartement est super joli et c’est assez calme. De fil en aiguille, nous apprenons que la casa est illégale et qu’il faut être discret lors des entrées et sorties, surtout quand un flic rôde dans les parages… et bien on est tout de suite mis au parfum !
Nous passons cinq jours à nous balader dans cette très belle ville, à admirer les vieilles voitures américaines des années 50, l’architecture magnifique des grands établissements publics, mais aussi tous ces immeubles défraîchis aux balcons entourés de fer forgé et reliés entre eux par un enchevêtrement sans nom de fils électriques. Nous croisons plein de gamins qui jouent au baseball dans la rue avec parfois juste un bouchon de bouteille en plastique et un bâton de bois, des petits vieux assis sur leur perron avec un gros cigare habano à la bouche, et ce qui nous plaît, c’est qu’aucune affiche publicitaire ne vient gâcher le tableau, cela nous change des autres pays visités ! D’un autre côté, nous nous rendons vite compte que cela ne va pas être facile de manger ce qu’on désire, les petites épiceries ne fournissent quasiment rien, un paquet de pâte et une sauce tomates pas plus, les marchés de fruits et légumes sont de loin pas les mêmes que ceux dont nous avons tant profité dans le reste de l’Amérique latine (peu de choix et la qualité pas toujours au rendez-vous) et même l’eau en bouteille est à un prix élevé.
Nous découvrons donc les typicités du pays et nous tentons d’apprendre son fonctionnement. Surtout que dans quelques jours, un couple d’amis de Suisse, Amélie et Gaëtan (les poulets comme on les appelle !), nous rejoignent pour deux semaines de vacances, et nous voulons être prêts à leur offrir un beau séjour. Nous prenons donc des informations sur les transports. D’abord le train, pas très cher mais il met 6h jusqu’à notre prochaine destination et en plus la nuit, pas très pratique. Le bus pour les touristes ne met que 3h mais il est hors de prix. Selon le guide, on peut aussi faire du stop, c’est d’ailleurs un mode de transport réglementé par un agent qui distribue un ticket à toute personne en attente à des points définis à la sortie des villes et chaque véhicule appartenant au gouvernement est censé s’arrêter pour prendre les auto-stoppeurs. Mais il faut avoir du temps pour cette solution, beaucoup de temps. Vu la pénurie de transports publics à Cuba et le prix élevé des taxis, tous les cubains font du stop, il faut donc être très patient… Pour deux semaines de vacances, cela ne semble pas très adapté.
Un email de cette copine du Mexique qui nous a déjà aidé pour le logement nous indique qu’il est possible de voyager dans des vieilles voitures américaines, il ne nous reste « plus qu’à » trouver d’où partent ces voitures. Un bus de la ville est sensé pouvoir nous y déposer. Nous attendons une demi-heure en vain que ce bus arrive avec une fille d’une cinquantaine de personnes. Nous changeons de plan pour une petite jeep un peu plus chère mais toujours raisonnable. Nous arrivons à la place de la révolution où est censé se situer ce terminal. Personne n’a l’air de savoir ce que sont ces vieilles voitures, on nous dirige vers de gros bus touristiques de Transtur, une des grandes agences de voyage de Cuba appartenant au gouvernement. Le chauffeur ne peut pas nous aider, nous demandons donc à un cocotaxi (une moto tirant un siège pour deux personnes), qui ne trouve rien de mieux que de se foutre de notre gueule, en nous disant que le terminal se trouve à l’autre bout de la ville, qu’il veut bien nous emmener pour quelques 10 CUC (12CHF) et comme on dit qu’on n’a pas cet argent, il ouvre son porte-monnaie pour payer la course. Bref, on repart presque en l’insultant. Dépités, nous décidons de rentrer au centre et nous demandons à un cubain dans la rue où se trouve le bus pour rentrer. De fil en aiguille, nous lui parlons de ces vieilles voitures et enfin il nous indique l’endroit recherché et nous dit que c’est 5 CUC jusqu’à Pinar del Río, notre objectif. Une fois sur place, nous discutons avec un des chauffeurs, il veut nous facturer 15 CUC par personne ! On essaie de négocier, mais il nous dit qu’il n’a pas le droit de prendre des étrangers et que pour cette raison, c’est plus cher, une prime de risque en fin de compte. On arrive quand même à descendre le prix, mais on sait que le moment voulu, il faudra batailler sec.
Nous voilà de retour au centre, abattus devant l’ampleur de la tâche. Les transports publics sont pratiquement inexistants, les bus pour touristes sont hors de prix et si on veut voyager comme les cubains, les gens ne veulent pas nous indiquer les lieux de départ ou on doit payer beaucoup plus. Ca va pas être facile… Dernière solution, la location d’une voiture. Comme on sera quatre, on pourrait partager les frais. On fait une dizaine d’agences de location (qui sont en fait seulement 3 entreprises, toutes appartenant au gouvernement) et les prix sont décourageants. On n’a jamais été confronté à des prix aussi élevés de tous les pays que nous avons visités. Nous en parlerons avec nos amis quand ils arriveront.
Ah oui, il faut quand même qu’on vous raconte une anecdote dont on se rappellera longtemps. Même après plus d’un an et demi de voyage et de nombreuses embrouilles évitées, on arrive encore à se faire avoir… Le deuxième jour de notre arrivée à La Havane, nous déambulons dans les rues, encore tout frais et avides de rencontrer des cubains. Un couple de jeunes de 25-30 ans nous aborde tout sourire avec quelques mots en français et nous demande si nous avons entendu parler d’un festival de la salsa. Alors nous, bien sûr, on dit que non et ils nous proposent de les suivre. Nous nous installons à un bar et on commande des mojitos (cocktail avec rhum-menthe-sucre-glaçons). Le couple est super sympa, nous parlons de Cuba, de leurs conditions de vie, des restrictions gouvernementales, nous parlons aussi de chez nous, de notre voyage, vraiment un contact super sympathique. Bref, après une heure, toujours pas de festival de la salsa, bizarre, ça doit être plus tard. Le gars nous demande si on veut recommander des mojitos et Yannick répond qu’il préfère voir la note avant. Et il n’a pas tout tort, car chaque mojito coûte 4 CUC (4.80CHF) et bien sûr, on doit payer les 4 mojitos ! Et tac, 16 CUC qui partent en fumée, le tiers de notre budget journalier… Nous faisons nos adieux au couple, avec le goût amer des mojitos… Et on peut vous dire qu’on a jamais revu de mojitos aussi chers de tout Cuba, on s’est bien fait avoir ! On vous met donc en garde contre le soi-disant festival de salsa de la Havane, si vous entendez ça, courrez !
Bon c’est pas tout ça, mais il faut qu’on aille sur Internet, histoire de mettre à jour le blog et envoyer quelques mails. Et bien c’est pas facile du tout ici. C’est vite vu, ça coûte 6 CUC (7.20CHF) de l’heure dans les hôtels, quelques 15 fois plus cher que tout le reste des pays latins que l’ont a visités ! En plus c’est très lent. Ce prix s’avèrera être le même dans tout le pays, car géré par le gouvernement comme d’hab’. Est-ce qu’on vous a dit que le salaire moyen du cubain est de 20.- suisses par mois ? On vous laisse imaginer le fossé que le gouvernement crée entre le canal local et le touristique… Et bien sûr, les cubains n’ont pas droit à Internet (à part de manière illégale…), c’est uniquement pour les étrangers. Cela fait partie de la politique de mainmise sur la population. Par contre les cubains peuvent accéder à un service de messagerie, mais cela coûte quand même cher et tout est contrôlé. Et bien voilà, on est assez vite mis au parfum, le blog sera sur pause et nos contacts avec l’extérieur limités !
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Il y a 10 ans
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